Mise à jour mars 2023
Au sommaire
1. L’intégration de la performance énergétique aux caractéristiques du logement décent
- Qu’est-ce qu’un logement décent ?
- Quels sont les critères de décence en termes de performance énergétique ?
2. Le DPE moyen de lutte central contre la précarité énergétique
- Qu’est-ce qu’un DPE ?
- Qui peut établir un DPE ?
- Quelles informations le DPE doit-il comporter ?
- Quelle est la durée de validité du DPE ?
3. Les obligations du bailleur
- Quelles sont les obligations d’affichage ?
- Quelles sont les conditions pour augmenter un loyer ?
- Quelles sont les exceptions à l’obligation de performance énergétique ?
4. Les recours en cas de litige
- Quels sont les recours dont dispose le locataire ?
- Quelles sanctions le propriétaire encourt-il ?
La lutte contre l’habitat dégradé est un sujet de préoccupation majeur des politiques publiques de l’Habitat. Il s’agit d’un sujet complexe qui combine plusieurs droits fondamentaux contradictoires. En effet il faut prendre en compte simultanément le droit des locataires à vivre dans la dignité, le droit de propriété du propriétaire bailleur et les enjeux de salubrité et d’hygiène publique par le pouvoir de Police du Maire ou du Préfet.
Afin de mener à bien leur mission, les pouvoirs publics ont instauré deux niveaux de lutte contre l’habitat dégradé : la décence des logements qui en est le volet de droit privé et l’habitat indigne qui en est le volet (plus général) de droit public relevant de l’action des autorités administratives comme celle du maire ou de l’Etat (A.R.S.).
Dans le cadre de cette politique le législateur a donc promulgué un décret le 30/01/ 2002 permettant de caractériser le logement non décent.
A l’origine la notion de performance énergétique n’était pas prise en compte dans les critères de décence du décret. En effet il évoquait uniquement l’obligation d’une installation permettant un chauffage normal.
Par la suite, en 2007, le législateur a instauré l’obligation d’établir un DPE (Diagnostic de Performance Energétique) seulement pour informer le locataire. Mais il ne prévoyait pas de sanctions en cas d’absence de DPE.
La question de la rénovation énergétique devenant une volonté essentielle des politiques publiques et s’inscrivant de plus en plus dans les rapports locatifs, le législateur a élaboré la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte du 17 août 2015 qui a modifié l’article 6 de la loi du 6 juillet 1989 et intégré la performance énergétique parmi les caractéristiques définissant un logement décent.
Mais ce sont une réforme et deux lois successives, qui vont accélérer les obligations du propriétaire.
En effet en 2021, la réforme du DPE va le rendre plus fiable et opposable.
Et en 2019 et 2021, les lois « Energie et Climat »(1) et « Climat et Résilience »(2) vont prévoir cette fois-ci des sanctions pour la location de certains logements : les passoires énergétiques.
Les sanctions ayant pour objectif de diminuer la rentabilité locative du logement (gel de l’augmentation des loyers) et de reconnaitre le logement non décent afin de le rendre plus difficile à la mise en location.
L’objectif de cette note est de faire le point sur la réforme du DPE et les nouvelles exigences de performance énergétique.
1. L’intégration de la performance énergétique aux caractéristiques du logement décent
Qu’est-ce qu’un logement décent ?
Un logement proposé à la location doit avoir une surface minimum. Il doit comporter au moins une pièce principale ayant soit une surface habitable d’au moins 9 m2 et une hauteur sous plafond d’au moins 2,20 m soit un volume habitable d’au moins 20 m3.
Le logement ne doit pas présenter de risques pour la sécurité et la santé du locataire. Il doit assurer le clos et le couvert. Il doit être protégé contre les infiltrations d’air parasites. Les dispositifs de retenue des personnes situés dans le logement et dans ses accès doivent être dans un état conforme à leur usage. La nature, l’état de conservation et d’entretien des matériaux de construction, des canalisations et des revêtements du logement ne doivent pas présenter de risques manifestes pour la santé et la sécurité physique des locataires. Les réseaux et branchements d’électricité et de gaz doivent être conformes aux normes de sécurité et sont en bon état d’usage et de fonctionnement.
Le logement ne doit pas être infesté par des animaux nuisibles ou des parasites (punaises de lit, cafards).
Le logement doit disposer d’une installation permettant un chauffage normal, d’une installation d’alimentation en eau potable, des installations d’évacuation des eaux usées d’une cuisine ou coin cuisine, d’une installation sanitaire intérieure au logement et d’un réseau électrique.
Quels sont les critères d’un logement en termes de performance énergétique ?
Selon l’article 6 de la loi du 6 juillet 1989 le logement décent doit répondre à un critère de performance énergétique minimale et être doté des éléments le rendant conforme à l’usage d’habitation.
Le décret en Conseil d’État du 9 mars 2017 définit le critère de performance énergétique minimale à respecter et un calendrier de mise en œuvre échelonnée et modifie le décret n°2002-120 du 30 janvier 2002 relatif aux caractéristiques du logement décent en conséquence. Il précise les qualités minimales que le logement doit recouvrir pour pouvoir être qualifié d’énergétiquement décent au sens de la loi TEPCV. Il s’agit d’éléments intrinsèques à sa conception, indépendants du mode d’occupation du logement et du coût de l’énergie.
Ce critère est différent selon que le logement est situé en métropole ou dans les Dom :
Lorsque le bail est signé (ou renouvelé ou reconduit) depuis le 1er janvier 2023, le logement doit consommer moins de 450 kWh d’énergie finale par m2 de surface habitable. Cette consommation est estimée par le diagnostic de performance énergétique (DPE).
Lorsque le bail est signé à partir du 1er janvier 2025 (ou renouvelé ou reconduit), le logement doit appartenir aux classes à A à F du DPE. Lorsque le bail est signé à partir du 1er janvier 2028 (ou renouvelé ou reconduit), le logement doit appartenir aux classes à A à E du DPE.
Lorsque le bail est signé à partir du 1er janvier 2034 (ou renouvelé ou reconduit), le logement doit appartenir aux classes à A à D du DPE.
Le logement décent doit répondre à un critère de performance énergétique minimale et être doté des éléments le rendant conforme à l’usage d’habitation.
2. Le DPE outil de lutte contre la précarité énergétique
Qu’est-ce que le DPE?
Le diagnostic de performance énergétique (DPE) a été créé en 2006. Cet outil de mesure sert à renseigner sur la performance énergétique d’un logement ou d’un bâtiment, en évaluant sa consommation d’énergie et son impact en termes d’émission de gaz à effet de serre.
Ce document sensibilise propriétaires et locataires quant à la consommation d’énergie et aux émissions de gaz à effet de serre occasionnées par leur logement, notamment dans une perspective de travaux de rénovation.
Qui peut établir un DPE ?
Le diagnostic de performance énergétique doit être réalisé par un diagnostiqueur certifié et ayant souscrit une assurance professionnelle.
Les diagnostiqueurs doivent obligatoirement transmettre le DPE à l’observatoire de l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie. Ce dernier délivre ensuite un nombre à 13 chiffres qui sera inscrit sur le DPE. Sans ce numéro d’identification, le DPE n’est pas valable.
Quelles informations le DPE doit-il comporter ?
L’arrêté du 31 mars 2021 relatif au diagnostic de performance énergétique pour les bâtiments ou parties de bâtiments à usage d’habitation en France métropolitaine précise ce que doit contenir le diagnostic de performance énergétique.
Les éléments suivants doivent notamment y figurer : les caractéristiques pertinentes du logement et le descriptif de ses équipements ;l’indication de la quantité annuelle d’énergie consommée ou estimée pour chaque catégorie d’équipements et l’évaluation de ces dépenses annuelles de consommation ;l’évaluation de la quantité d’émissions de gaz à effet de serre liée à la quantité annuelle d’énergie consommée ou estimée ;le classement du logement en application d’une échelle de référence (étiquette « énergie ») ;des recommandations visant à améliorer la performance énergétique du logement, accompagnées d’une évaluation de leur coût et efficacité.
Le DPE comporte notamment une étiquette allant de A (logement extrêmement performant) à G (logement extrêmement peu performant, aussi qualifié de « passoire thermique ») intégrant deux volets : la consommation énergétique et la quantité d’émissions de gaz à effet de serre.
Le calcul du DPE est ainsi fait que la lettre le symbolisant (la « classe ») résulte de la plus mauvaise des deux évaluations (celle de la consommation d’énergie et celle des émissions de gaz à effet de serre).
Quelle est la durée de validité du DPE ?
Le DPE a une durée de validité de dix ans.
Toutefois les DPE réalisés entre le 1er janvier 2013 et le 31 décembre 2017 inclus sont valables jusqu’au 31 décembre 2022.
Les DPE réalisés entre le 1er janvier 2018 et le 30 juin 2021 inclus sont valables jusqu’au 31 décembre 2024.
Même si les DPE réalisés entre le 1er janvier 2018 et le 30 juin 2021 restent valables jusqu’au 31 décembre 2024, il est préférable de faire réaliser un nouveau DPE. L’acheteur ou le locataire risque en effet de vouloir disposer d’un diagnostic réalisé selon la nouvelle réglementation.
3. Les obligations du bailleur en termes de performance énergétique du logement
Quelles sont les obligations d’affichage ?
Les annonces immobilières de vente ou de location, qu’elles soient diffusées par des professionnels de l’immobilier ou des particuliers, doivent faire figurer les informations suivantes : les classements énergétique et climatique du logement sur les échelles de référence (A à G).
Si le logement est classé F ou G, l’annonce doit comporter la mention « logement à consommation énergétique excessive ».
Le montant estimé des dépenses énergétiques annuelles du logement.
La loi impose par ailleurs au propriétaire de tenir le diagnostic de performance énergétique à la disposition de tout candidat acquéreur3 .
Le DPE doit donc être idéalement réalisé dès la décision de vendre ou louer prise afin de renseigner l’annonce et être présenté lors des visites.
Est-ce que la réalisation d’un DPE est obligatoire pour louer un logement ?
Le DPE doit être réalisé dans tous les logements, sauf ceux destinés à être occupés moins de 4 mois par an. L’obligation de fournir un DPE s’applique à tous les propriétaires du parc privé (personne physique, ou personne morale, compagnie d’assurance) ou du parc public (organisme HLM, par exemple). Cette obligation ne s’applique ni aux logement-foyers, ni aux maisons de retraite4 . Elle ne concerne pas non plus la location saisonnière5.
En revanche, les contrats de location de logements pour étudiants, ces logements étant des résidences principales des occupants, sont soumis à l’obligation de fourniture d’un diagnostic
En cas de location d’un lot dans un immeuble soumis au statut de la copropriété, le DPE ne concerne que les parties privatives du lot, sauf si un DPE collectif a été réalisé.
Le bailleur doit fournir au locataire une copie du DPE lors de la signature du bail. Il est annexé au contrat de location. Depuis le 1er juillet 2021, il est pleinement opposable. Le locataire a la possibilité de contester des éléments inexacts mentionnés sur le DPE (à l’exception des recommandations de travaux) auprès du bailleur qui peut à son tour les contester auprès du diagnostiqueur certifié.
Quelles sont les conditions pour augmenter un loyer ?
Depuis le 24 août 2022, il est interdit d’augmenter le loyer des logements classés F et G lors du renouvellement du bail ou de la remise en location. Ces mesures concernent les contrats de location conclus à compter du 24 août et s’appliqueront progressivement aux baux en cours, en fonction de leur reconduction ou renouvellement. Elles entreront en vigueur le 1er juillet 2024 pour les territoires d’Outre-mer.
Si le logement est considéré comme à consommation énergétique excessive, le bailleur ne peut pas appliquer un loyer supérieur à celui du précédent locataire, lors de l’établissement du nouveau bail ; ni procéder à la révision annuelle du loyer en cours de bail ;ni proposer une augmentation de loyer au locataire lors du renouvellement du bail.
Cette mesure est une étape importante dans la lutte contre les passoires thermiques.
Quelles sont les exceptions à l’obligation de performance énergétique ?
Le législateur a pris en compte les difficultés dans certaines situations d’appliquer les nouvelles mesures de performance énergétique. Il a donc admis des exceptions aux dispositions adoptées.
Il s’agit des travaux de rénovation énergétique qui imposent des modifications de l’état des parties extérieures ou des éléments d’architecture et de décoration, en contradiction avec les règles et prescriptions prévues pour les monuments historiques classés ou inscrits et les abords des monuments historiques.
Il s’agit aussi des travaux de rénovation énergétique qui excédent 50% de la valeur vénale du bien, évaluée par un professionnel de l’immobilier Les travaux de rénovation énergétique qui font courir un risque de pathologie au bâti, ce risque devant être justifié par « un homme de l’art ».
De même font exception, les travaux de rénovation énergétique non conformes à toute autre obligation relative « au droit des sols, de propriété, à la sécurité des biens et des personnes ou à l’aspect des façades et à leur implantation ».
Enfin le propriétaire n’obtenant pas l’accord et la participation de sa copropriété dans un projet de rénovation énergétique ne pourra pas être sanctionné. «Le propriétaire devra tout d’abord prouver qu’il a fait tous les travaux qui lui étaient possibles de faire en parties privatives. Ensuite, il devra apporter tout élément démontrant qu’il a voté le projet de travaux collectifs en assemblée générale, via le procès-verbal établi par le syndic ».
4. Les recours en cas de litige
Quels sont les recours dont dispose le locataire ?
Si le logement n’est pas décent, le règlement du litige à l’amiable est préconisé. Le locataire doit indiquer par écrit au propriétaire les signes de non-conformité du logement aux critères de décence. Il doit faire préciser au propriétaire, par lettre recommandée avec accusé de réception, les travaux de mise en conformité que le propriétaire s’engage à effectuer et les délais de réalisation de ces travaux.
Le locataire ne doit en aucun cas cesser de payer tout ou partie de son loyer sous prétexte que le propriétaire ne respecte pas ses obligations.
En cas de persistance du litige il sera nécessaire de saisir la commission départementale de conciliation dans un premier temps.
En cas d’échec de la tentative de conciliation il appartiendra au juge du tribunal de proximité du lieu de l’immeuble de trancher et de constater la non-décence du logement.
Quelles sanctions le propriétaire encourt-il?
Le propriétaire encourt des sanctions civiles fixées par l’article 20-1 de la loi du 6 juillet 1989 et qui peuvent consister en l’obligation de réaliser les travaux de remise aux normes de décence potentiellement assortie d’une astreinte par jour de retard, en la réduction éventuelle voire la suspension du montant du loyer, en des dommages et intérêts pouvant être alloués au locataire pour manquement par le propriétaire à son obligation de jouissance paisible du logement à son locataire. Enfin le propriétaire peut risquer la suspension des aides au logement par la CAF (durée 18 mois).
Il peut par ailleurs s’exposer à des sanctions pénales, notamment des contraventions, en cas de manquement au RSD, pour délit de risque causé à autrui(6) et délit d’hébergement indigne(7) .
Ce délit impliquant aussi que la victime soit vulnérable, c’est-à-dire dans un état de faiblesse apparent ou connu de l’auteur.
(1) Loi EC – n° 2019-1147 du 8 novembre 2019
(2) LOI n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets
(3) article L 126-28 du CCH
(4) loi du 6.7.89 : art. 2 et 3-1
(5) CCH : L.134-3-1 / loi ENE : art. 1).
(6) Article L. 223-1 du code pénal
(7) Articles L. 225-14 et suivants du code pénal